Le prologue se déroule au Jardin des Plantes ; quatre personnages, tous des jeunes peintres discutent des écoles et des techniques de peinture. Tandis que Chassagnol et Coriolis expriment chacun son avis sur la peinture allemande, Anatole, désintéressé du débat, tente de détourner l ‘attention de ses amis vers ses blagues et la description panoramique et spectaculaire qu’il fait de la ville de Paris.
Le Premier Tableau se déroule dans l’atelier de Coriolis. Les deux premières scènes décrivent les premiers signes d’amour et de jalousie que ressent Coriolis le peintre vers son modèle : Manette et l’insoumission de celle-ci. Il l’invite à une promenade en canot. A son départ, Coriolis en fait un portrait flatteur (scène 3) et relate à Chassagnol les circonstances de son enrichissement et les aventures de leur ami Anatole. Il lui parle aussi des circonstances hasardeuses da sa première rencontre avec Manette. Il révèle alors les origines juives de cette dernière et quelques uns de ses traits de caractère. (scène 4 et 5).Puis Anatole laisse libre cours à son tempérament moqueur et tourne en dérision le Père Mijonnet, un pauvre vendeur ambulant de matériel de peinture (scène 6). L’arrivée de Garnotelle est l’occasion de peindre à la fois l’importance des relations dans le milieux artistique de l’époque et les moyens autres que le talent pour accéder à la célébrité. La scène 7 met ainsi Garnotelle peintre mondain à l’opposé de Coriolis artiste authentique déclarant préférer son atelier isolé au vacarme et aux plaisirs que peut offrir la vie parisienne ; la femme et le luxe sont incompatibles avec la création artistique.
Le second tableau se déroule dans un cabaret du Bas-Meudon, au bord de la scène. Dans l’attente nerveuse de Manette qui ne vient pas, Coriolis écoute la peinture blagueuse que fait Anatole et ses compagnons _ deux canotiers et un modèle _ de l’ambiance qui règne dans les milieux artistiques (scène1). En voyant arriver Chassagnol, Anatole fait le récit des mésaventures de celui-ci et de son don à ne pouvoir profiter des chances qui lui sont offertes. Chassagnol prononce alors un plaidoyer contre le Prix de Rome et fait l’éloge du renouveau et de la créativité dans l’art (scène 2).
Coriolis, emporté par la colère de ne pas voir sa bien-aimée, lance des critiques dures à Anatole, artiste raté et paresseux.
Dans l’atelier de Coriolis (troisième tableau), Anatole et Chassagnol évoquent la jalousie, devenue maladive et honteuse de Coriolis (scène 1). Garnotelle vient inviter Coriolis à l’ouverture de la chapelle qu’il a décorée (scène 2), l’occasion de demander à Anatole s’il faisait encore de la peinture. A sa sortie, Chassagnol l’accuse de ne pas être un artiste puisque dépouillé de tout talent. Le tableau est ainsi un défilé de peintres différents dont chacun a choisi ou s’est vu imposer une manière de gagner sa vie. Coriolis entre gris de colère : il ne trouve Manette nul part et exprime à Anatole sa volonté de dompter cette belle créature et de lui interdire de poser pour les autres (scène 4). A son arrivée (scène 6 et 7), il la prie pour la énième fois de vivre avec lui. Après avoir proclamé sa liberté, elle accepte son offre à condition, dit-elle, qu’il s’engage « à devenir très prochainement un grand peintre » (page 58)
Dans son atelier (quatrième tableau), Coriolis voit cohabiter difficilement Manette et Anatole, accompagné d’un singe. Il exprime à son ami son bonheur depuis qu’il possède Manette ; il raconte comment suite à un soupçon, il a suivi sa bien-aimée jusqu’à une synagogue de Paris où il s’est vu rappeler l’appartenance juive de celle-ci ; il raconte avec un certain mépris sa « juiverie », et fait en même temps le portrait de cette compagne qui répond si miraculeusement à son idéal féminin : peu cultivée mais sensible à l’art et respectueuse du travail du peintre, sociable mais ayant peu de fréquentations (scène 2). Chassagnol entre indigné pour le manque d’estime que suscite les tableaux orientalistes de Corilois, face à la nouvelle mode lancée par Decamps, suivi par Garnotelle. Il dit avant de sortir avoir aperçu Manette devant l’atelier d’un peinture (scène 3). Rangé de colère, Coriolis fouille dans les affaires de Manette et découvre une photographie datée de cette pose (scène 6). Manette arrive (scène 7) indignée et avoue n’avoir pu refuser l’invitation à une dernière pose pour une œuvre entamée quelques années plus tard. Elle revient sur la promesse qu’elle lui a faite. Coriolis, ayant trouvé une pièce d’or indienne qui lui appartenait et qu’il avait offerte à une petite fille qui posait dans l’atelier de son maître, se rend compte que Manette est elle –même cette petite fille. Les deux amants acceptent le sort qui les a réunit pour la seconde fois. « Nous sommes fatalement liés l’un à l’autre, à tout jamais » (page 74).
Dans son atelier (cinquième tableau), Coriolis raconte à Chassagnol comment Manette, amoureuse de sa propre beauté et ne posant plus pour personne, s’est fait une manie de se dénuder devant son miroir et d’admirer son corps (scène 1). Coriolis raconte devant l’admiration de Manette et de Chassagnol le succès qu’a suscité son tableau à l’exposition (scène 2). Anatole entre complètement ivre et inconsolable suite à la mort de son singe (scène 3). Manette en profite pour médire de cet ami en l’accusant de lui manquer de respect. Elle lui annonce avec mélancolie qu’elle est enceinte.
Dans une auberge de Fontainebleau (sixième tableau), Coriolis, accompagné de Manette et d’Anatole font la connaissance d’un couple d’aubergistes fort amusants. Manette est furieuse contre un américain qui, sans connaître le métier qu ‘elle exerçait, a dit que dans son pays les modèles avaient un statut peu flatteur (scène 3). Garnotelle, de passage dans l’auberge, vient saluer Coriolis et lui dire son désir de partir pour Rome (scène 4). Anatole raconte une blague qu’il a faite aux compagnons russes de Garnotelle et qui a encore déplu à ce dernier. Le bohème continue à rêver de fortune et de succès et est à peine dérangé par le rappel à la réalité de Coriolis (scène 5).
Dans son atelier (septième tableau), Coriolis exprime à Chassagnol son manque d’inspiration et l’absence de talent. Son atelier dénudé de toute décoration et l’absence d ‘Anatole témoignent de son peu d’enthousiasme (scène 1 et 2). Crescent, voulant prendre un dessin que Coriolis lui avait promis se voit le refuser par Manette qui gère elle même la carrière, la fortune et même les relations de son mari (scène 3). Seul avec Manette, Coriolis, désespéré, exprime sa colère face à cette femme qui l’a transformé en faiseur de tableaux, sans talent et sans goût (scène 4). Manette semble satisfaite de manipuler si brillamment son mari (scène 5 et 6), mais l’arrivée de Garnotelle, avec qui elle semble avoir des liens intimes, lui apprend que sa marionnette a refusé la décoration que lui a offert le ministère grâce à l’intervention de Garnotelle (scène 7) ; sa colère n’est rien devant celle de son mari qui vient d’apprendre que deux de ses œuvres, que Manette lui a fait vendre à bas prix venaient d’avoir un grand succès lors d’une récente vente ; des œuvres du temps où il était un vrai artiste. Il se met alors à brûler ses toiles et a failli atteindre Manette (scène 9).
Dans un café du jardin du Luxembourg (huitième tableau), Anatole s’amuse à donner à une « peintresse » la recette pour réussir un portrait avec les moindres frais (scène 1) ; Chassagnol, critique d’art est en train de finir un article sur le beau (scène 2) lorsque passe Garnotelle. Anatole l’interpelle et se moque de son arrivisme ; il vient de se porter candidat à un poste à l’Académie, grâce à une alliance (scène 3). Selon Anatole, un homme qui n’a ni talent ni distinction et qui est bourré de relations est celui qui a le plus de chance d’accéder à ce poste. Anatole était en train de raconter à Chassagnol les conditions de sa séparation avec Coriolis quand celui-là passe. Il chasse Chassagnol et interpelle son ancien ami qu’il trouve dégoûté de la vie que lui impose Manette (scène 5). Mme Crescent propose à Anatole un poste au Jardin des Plantes qui lui garantit un revenu stable (scène 7).
Au neuvième tableau, Coriolis invite Anatole chez lui. Assistant impuissant au mauvais traitement qu’impose Manette à son convive, par l’intermédiaire de son enfant et sa servante. Anatole tente par son humeur d’éloigner la colère grandissante de son ami ; il sort en promettant de revenir « quand la patronne de l’endroit sera une catholique » (page 154) ; allusion antisémite de cette pièce dont l’auteur ne cache pas son sentiment anti-juif (scène 7).